Le golf de Longwy est-il menacé par le projet d’un golf «pharaonique», qui
doit voir le jour en 2020 à Arlon en Belgique ?
À Arlon, un golf qualifié de pharaonique devrait voir
le jour en 2020, et pourrait provoquer quelques maux de tête aux responsables
de celui de Longwy. Porté par un homme d’affaires luxembourgeois
multimillionnaire, il serait accompagné d’une zone de loisirs et d’un hôtel
cinq étoiles.
« Pharaonique», «immense», «le plus beau du
monde», etc. : les commentaires de la presse belge sont dithyrambiques
pour qualifier le projet de golf qui devrait ouvrir à Arlon en 2020 et qui
serait financé à 100 % par de l’argent privé. L’homme d’affaires
luxembourgeois Roby Schintgen, multimillionnaire grâce à ses activités dans le
logement notamment, s’est fait un petit plaisir il y a quelques années en
achetant le domaine du bois d’Arlon pour 2,1 millions d’euros, soit 600
000 euros de plus que sa valeur estimée.
Il l’a rénové, et a ensuite eu l’idée
d’installer sur les 220 hectares deux parcours de 18 trous et un de
9 trous pour les entraînements. Il souhaite aussi aujourd’hui y mettre
une zone de loisirs, un club-house, et ouvrir dans le château un hôtel cinq
étoiles de 86 chambres. À la clé : une trentaine d’emplois. Sans
parler des chasses qui pourraient être organisées dans les bois alentours
Accompagner le projet en modifiant l’affectation de
certains terrains, parlent également d’écologie. Ils listent l’aménagement de
pistes cyclables, une récupération poussée de l’eau utilisée pour l’entretien,
des plantations d’arbres à la place des épicéas pour «développer la
biodiversité», une herbe importée du Maroc nécessitant un arrosage moindre, des
mares mises en place ici et là, etc. En clair : les hommes politiques et
les joueurs de golf de la province et des pays voisins sont unanimes : il
n’y aurait presque pas mieux sur la planète.
Un transfert de joueurs?
Jean-Nicolas Burnotte, secrétaire fédéral du Mouvement
ouvrier chrétien (MOC) de la province de Luxembourg, n’est pas de cet avis. Il
a participé il y a quelques mois à l’étude «Développement territorial et
utilisation parcimonieuse des sols en province du Luxembourg» sur la période
2004-2014 au sein d’un groupe de travail du MOC. Et les conclusions sont
alarmantes. « On note la disparition de 2 081 hectares de terres
agricoles, et de 92 hectares de forêts. Cela pose question en termes de
conséquences sur les ressources locales, la biodiversité, la transformation
irréversible des paysages. Parler d’écologie sur ce golf de 220 hectares
n’est pas sérieux. On peut à la rigueur comprendre les motivations économiques,
avec ces emplois créés. Mais on se dit que : ça ne va pas améliorer les
choses pour les paysans; l’accès de ce loisir est très coûteux, rendant
impossible aux chômeurs et précaires d’y jouer; et il y a déjà un golf à 25
minutes de là, à Longwy. On est dans une conjoncture compliquée, et face
à cela, les élus belges comme français proposent de construire des hypermarchés
partout, et des golfs partout. Jusqu’où? Des choses ferment et vont fermer… »
L’information est évidemment arrivée jusqu’aux
oreilles des membres de l’Observatoire citoyen du golf de Longwy. Qui vont dans
ce sens. « Cet équipement va mécaniquement entraîner, d’une part, une rétention
des joueurs belges et grand-ducaux qui fréquentent actuellement le golf de
Longwy, et d’autre part un transfert d’une partie des joueurs résidant sur le
secteur français. Par ailleurs, étant donné que la subvention d’équilibre
versée par la communauté d’agglomération de Longwy à l’exploitant Gaïa dans le
cadre de la délégation de service public prendra fin en 2021, il est probable
que Gaïa, dès cette échéance, ne soit pas en mesure de poursuivre son activité
faute de rentabilité financière. »
Sébastien Bonetti (Le Républicain
lorrain)
« Il ne nous fera pas d’ombre »
Pour Bernard Carminati, président de
l’Association du golf international de Longwy, « le golf d’Arlon ne nous fera
pas d’ombre. Car on a plus de 800 licenciés, dont 65 % de personnes
habitant la ville ou le Bassin. Elles n’iront pas en Belgique jouer. Ensuite,
on a 28 % de Luxembourgeois, qui viennent d’Esch-sur-Alzette et du sud du
pays. Eux non plus ne prendront pas d’abonnement à Arlon. Il reste 20 %
de Belges, à qui on a posé la question. Ils nous ont répondu qu’ils ne savaient
pas s’ils allaient s’inscrire. On n’est donc pas trop inquiets .»
Malgré tout, Bernard Carminati raconte
qu’une structure identique venait de fermer le 1 er janvier, à Gaichel,
non loin d’Arlon, mais au Grand-Duché. « Il a fermé, notamment, car nous avons
ouvert, et des joueurs sont venus ici. Ceci dit, je peux me tromper, mais on
n’a pas vraiment à s’inquiéter. On devrait perdre une cinquantaine de joueurs,
au maximum. »
Le président de l’association ne
s’enflamme également pas sur le projet d’Arlon. « Il n’est pas fait. Ils auront
peut-être l’autorisation pour un 18 trous, mais pas forcément pour les
deux. Car il s’accompagnerait de déboisement. Il faudra des accords sur le
sujet de l’écologie. On a mis dix ans à faire le golf de Longwy… »
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